Le terrier de l'Hôpital général de Limoges : un document de poids
Ce registre d’une taille considérable et à la présentation impressionnante présente un « look » tout à fait médiéval, pourtant il date de la fin du XVIIe siècle. Cet archaïsme est voulu : comme il rassemble les documents les plus importants de l’Hôpital général de Limoges, on a voulu lui donner un aspect particulièrement prestigieux.
Un document imposant
58 centimètres de haut, 35 de large, 245 feuillets de parchemin, 12 kilogrammes, c’est un document de poids ! (Archives départementales de la Haute-Vienne, H sup. Limoges B 496, 1660-1732).
La reliure
Le plus étonnant est la reliure, d’un type que l’on s’attendrait à trouver au Moyen Age mais pas en plein XVIIe siècle.
La couvrure. Une peau de bovin, non tannée, à laquelle on a laissé ses poils ; ce procédé inhabituel est destiné à provoquer l’étonnement du spectateur.
Les plats. Étant donné la dimension et le poids du registre, ils n’ont pas été réalisés en carton mais en bois (chêne probablement) ; on a utilisé deux planches d’environ 12 mm d’épaisseur, qui devaient être parfaitement sèches car elles sont encore aujourd'hui absolument planes.
Cinq cabochons par face protègent la couvrure des frottements contre l’étagère de rangement, car le registre était destiné à être posé à plat à la mode médiévale. Ils sont en fer forgé, au centre d’un pentagone ajouré.
Il y avait deux fermoirs, cloués aux plats par autre clous ; ils ont disparu.
L’intérieur est entièrement en parchemin : 245 feuillets (soit 490 pages), d’une dimension de 55 x 33 cm en moyenne. Le tout a dû représenter une dépense considérable.
La page de titre porte : Terrier de l’Hospital général de la ville de Limoges escript par moy soubsigné Nicolas Pouyat. Lemovix [limousin]. En fait, Nicolas Pouyat n’a écrit « que » la première moitié du registre environ.
Le registre contient la copie de 460 actes, parmi lesquels les lettres patentes du roi établissant un hôpital général des pauvres à Limoges (décembre 1660), des délibérations des consuls de la ville, le consentement de l’évêque et de diverses institutions religieuses et charitables, les contrats portant sur les approvisionnements à fournir, et des séries de testaments et de fondations en faveur de l’hôpital.
L’hôpital général de Limoges et ses archives
Il fut créé par décision royale en 1660 à la demande des consuls de Limoges, par imitation de l’hôpital général de Paris qui venait d’être établi quelques années auparavant. Les nombreuses institutions charitables qui existaient déjà à Limoges furent fusionnées avec le nouvel établissement : l’hôpital Saint-Gérald, la Maison-Dieu, l’hôpital Saint-Jacques, etc., plus une dizaine de confréries.
L’hôpital d’Ancien Régime n’a pas seulement un rôle dans le domaine de la santé : il a aussi des fonctions sociales et carcérales. On y regroupe certes les pauvres malades plus ou moins incurables, mais aussi les aliénés, les vieillards seuls, les indigents de passage, les mendiants de la ville, périodiquement enfermés autoritairement, les prostituées, les enfants abandonnés, en bref toutes les misères de la société. Dans la réalité d’aujourd'hui, ce serait l’hôpital, plus le CHS, une maison de retraite, les restos du cœur, les services sociaux, la maison d’arrêt…
Dossier préparé par Robert Chanaud, photographies de Richard Périchon.
Le fonds d’archives de l’hôpital général de Limoges antérieur à 1790 est particulièrement riche : il occupe environ 25 mètres linéaires de documents (essentiellement consacrés aux biens et droits, très peu à la population recueillie). Il est coté H sup Limoges, séries A à H.
Les archives des établissements rattachés à celui-ci sont cotées ainsi : H sup Limoges 1 (pour l’hôpital Saint-Martial), séries A à H, H sup Limoges 2 (pour l’hôpital Saint-Gérald), séries A à H, etc.